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(Courtoisie Société d’histoire d’Oka) Les pèlerins affluent à Oka pour la Fête du Calvaire. Photo prise en 1935.

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(Courtoisie Société d’histoire d’Oka) L’Empress amarré au quai en 1930.

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(Courtoisie Société d’histoire d’Oka) Le quai, vu du clocher, en 1938. Remarquez le hangar à marchandises qui se termine, sur la droite, par une cabane à bestiaux.

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(Photo Claude Desjardins) Le quai municipal, à Oka, tel qu’on le connaît aujourd’hui.

L’histoire se raconte au bout du quai

Publié le 19/06/2019

(C.D.) L’ouvrage en lui-même paraît modeste, à première vue. On l’a enjolivé de quelques lampadaires et garni de bancs sur lequel les passants vont s’installer en prenant une pose méditative, sinon, comme le suggère un dépliant de la Municipalité d’Oka, parce qu’il offre un point de vue idéal sur de flamboyants couchers de soleil. Mais le quai municipal n’est pas seulement qu’un élément du paysage.

Les visiteurs qui entreprennent de parcourir le circuit historique, produit en collaboration avec la Société d’histoire d’Oka, se verront alors proposer un arrêt sur ce quai dont la construction fut entreprise en 1867, à l’initiative de l’abbé Antoine Mercier, prêtre sulpicien et titulaire de la Mission de la bienheureuse Marie du lac des Deux Montagnes.

Celle-ci était alors stratégiquement enclavée dans un territoire occupé par des Algonquins, d’un côté, et des Iroquois de l’autre. Quelques familles blanches s’y étaient aussi installées puisqu’on y avait fait venir des artisans, tels le forgeron et le boulanger. C’est dans cette population métissée qu’on recruterait une main-d’œuvre bénévole et résolue à travailler main dans la main.

D’abord le bout!

Bien peu accessible par voie de terre, la mission s’approvisionnait alors au village de Como (aujourd’hui Hudson), situé de l’autre côté du lac, là où on allait aussi quérir le courrier qu’y déversait régulièrement le train. La traversée se faisait en chaloupe et comportait tout de même sa part de danger. «C’est pour ça qu’on a construit le quai», indique Réjeanne Cyr, vice-présidente de la Société d’histoire d’Oka, qui cite pour preuve la noyade tragique du maître de poste Hormidas Laberge et de ses quatre compagnons d’infortune, après une tentative imprudente de traversée hivernale, en décembre 1911.

Pour revenir à la construction elle-même du quai, sachez que l’ouvrage d’origine se limitait à deux caissons de 33 pieds sur 33 pieds, tenus ensemble par des pièces de bois et installés… à 200 pieds du rivage. C’est donc dire qu’on en a commencé la construction par le bout! L’idée, c’était que des bateaux de livraison pourraient y accoster et décharger leurs marchandises aussi bien que le courrier. Depuis la Mission, il suffisait de sauter dans une chaloupe pour aller récupérer le tout.

Avec les années, la structure s’est lentement transformée. On a d’abord construit un pont entre les rivages et les caissons d’origine. D’autres caissons se sont progressivement ajoutés, de telle sorte qu’en 1926 (et en sautant moult détails), le quai municipal finirait par apparaître dans la forme qu’on lui connaît aujourd’hui.

Destination spirituelle

Membre de la Société d’histoire d’Oka, l’historien Gilles Piédalue parle abondamment, dans un article récemment paru dans L’Encyclopédie du patrimoine culturel de l’Amérique française, de la très grande popularité du Calvaire d’oka, un chemin de croix jalonné de chapelles et d’oratoires qui, à une certaine époque, était une destination particulièrement prisée par les pèlerins catholiques.

Or, la construction du quai a grandement contribué à augmenter l’affluence de ces pèlerins qui, le 14 septembre de chaque année, prenaient le bateau à vapeur depuis Montréal pour se rendre à Oka, à l’occasion de la Fête du Calvaire. Citant les journaux de l’époque, M. Piédalue parle d’une foule évaluée à 30 000 personnes, en 1889, et même 35 000 en 1939. À titre comparatif, il en vient désormais une cinquantaine.

La construction du quai a changé beaucoup de choses à la Mission qui, tel que l’exigerait le Département des bureaux de postes du Canada, devrait raccourcir son nom (difficile de faire plus court que Oka!), et l’on considère qu’il demeure une partie intégrante du développement de la municipalité, telle qu’on la connaît aujourd’hui.

«Ce que je retiens, c’est cette belle histoire de partage et de collaboration entre les deux peuples qui se sont mis ensemble pour bâtir quelque chose», exprime Réjeanne Cyr. Pour dire les choses autrement, il arrive parfois qu’un simple quai puisse devenir un pont.