Le petit garage familial, établi, depuis 1958, est en train de vivre une transition que probablement, dit Alexandre Pilon, gestionnaire de l’établissement, la majorité des petites stations-services comme la sienne devra se préparer à vivre d’ici quelques années ou décennies tout au plus.
« J’ai dit non merci. »
Profitant du ralentissement économique provoqué par la pandémie, M. Pilon a fait ses devoirs et a pris le temps d’évaluer chaque aspect de son offre de service qui à ce moment comprenait : le service de pompiste, l’atelier mécanique, le remorquage et la location de camion. Il explique que quand son bail s’est terminé en décembre 2022, il avait la ferme intention de renouveler l’entente avec Ultramar, mais avec de meilleures conditions.
« C’est là qu’ils arrivent en me disant que les réservoirs, compte tenu de leur âge, étaient finis. J’ai dit pas de problème : remplacez-les. Mais ils ont refusé, ils voulaient nous les donner, ce qui pour moi, était vraiment un cadeau empoisonné, parce que je devenais responsable de la décontamination. J’ai dit non merci. »
C’est pourquoi ce qui aurait pu être une décision déchirante de tourner le dos à des décennies de service en tant que station-service s’est finalement avéré être une transition étonnement fluide pour le petit garage.
La vision d’Alexandre Pilon ne se limite pas à des considérations économiques. La proximité avec les gens est une dimension particulière qu’il chérit depuis toujours. Il compare l’ambiance à un « petit gaz bar blues » où les clients réguliers sont presqu’une famille.
Il devient émotif lorsqu’il évoque la détresse de certains clients à la suite de l’annonce de l’arrêt du service d’essence. « […] ça a créé une onde de choc! Les clients m’appelaient, d’autres sont venus me voir les yeux pleins d’eau. Des clients qui viennent de Saint-Joseph-du-Lac parce qu’ils préfèrent ne pas faire le plein eux-mêmes. D’autres, souvent des personnes âgées, qui n’ont jamais manié un pistolet à essence de leur vie. Certains venaient même au garage sans effectuer de transaction… juste pour parler ».
Une fois la décision prise, Parkland – à qui appartient Ultramar – a démontré un professionnalisme faisant foi de leur expertise en la matière. M. Pilon assure que la multinationale travaille « main dans la main » avec le ministère de l’Environnement et des Changements climatiques, et que chaque étape de la décontamination est faite de « façon très consciencieuse et méthodique ». Le garage est donc fermé jusqu’au début janvier, fermeture pour laquelle la pétrolière lui offre un dédommagement lui permettant de payer ses employés durant cette période.
L’avenir selon M. Pilon
Comment M. Pilon entrevoit l’avenir? Il pense que la majorité des petits joueurs du milieu de l’essence, comme lui, sont appelés à disparaître ou à évoluer, laissant la place à des stations-service moins nombreuses, plus grandes, comme des mini complexes commerciaux situés dans des lieux stratégiques à haut volume.
Et pour son garage? Il travaille avec le Service de l’urbanisme de la Ville de Saint-Eustache pour doter son commerce d’une nouvelle façade au goût du jour. Les plans sont approuvés et il prévoit ajouter un peu de verdure là où il y avait du bitume. Finalement, il voit sa décision comme quelque chose de bénéfique pour la ville de Saint-Eustache et la communauté. « Tu sais, je suis un Eustachois très fier. Je suis content de dire qu’on décontamine et qu’on retire 100 000 litres de pétrole du sol. Ça vaut des millions! »
En conclusion, le terrain est maintenant réenseveli et l’atelier mécanique ouvert à la clientèle et pleinement opérationnel depuis le 7 janvier dernier. Certaines analyses sont toujours attendues pour confirmer l’absence de contaminant, mais peu importe les résultats, M. Pilon, s’est vu confirmer qu’il n’y aurait plus de rupture de service quant aux opérations de son commerce.
De quoi réjouir l’entrepreneur dévoué à sa mission d’offrir des services mécaniques de qualité et maintenir son lien de proximité avec sa clientèle et la communauté eustachoise.
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Arthur Sauvé
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