Coprésident de l’Association des propriétaires de cinémas du Québec (APCQ) et copropriétaire du Cinéma Saint-Eustache et des cinémas Carrefour du Nord, à Saint-Jérôme, Éric Bouchard est de ceux qui acceptent malgré tout les règles du jeu. Comme la très grande majorité des 80 membres de l’APCQ (100 cinémas), il accueillera le public dès le 26 février. Il estime par ailleurs que les choses ont un peu dérapé depuis une semaine.
Pertes de revenus
«Il faut comprendre que les cinémas sont les premiers commerces à avoir été fermés, le 16 mars 2020. Ils ont été les derniers à pouvoir rouvrir, le 3 juillet, avant d’être refermés en majorité le 30 septembre. Depuis un an, on a perdu 95 % de notre chiffre d’affaires, en comparaison avec l’année précédente», exprime M. Bouchard, ajoutant que bien peu de PME pourraient passer à travers une tempête semblable. Voilà qui explique sans doute pourquoi certains ont l’épiderme fragile.
Ça explique aussi cette vive réaction devant l’interdiction de vendre de la nourriture à la clientèle (35 % à 45 % des revenus), puisque celle-ci ne sera pas autorisée à retirer son masque dans les salles de projection et partout ailleurs dans la bâtisse. «Le popcorn et le cinéma, ça va ensemble. Est-ce que les restaurateurs pourraient arrêter de vendre du vin?», répond Éric Bouchard à ceux qui remettent en question le modèle d’affaires des salles de cinéma.
C’est la raison pour laquelle l’APCQ a d’abord refusé la proposition gouvernementale. «On ne voulait pas une compensation financière (ils en recevront tout de même). On voulait vendre de la bouffe», dit-il.
L’application d’un couvre-feu à 20 h, par ailleurs, rend impossible la présentation des films en soirée. «Ça nous fragilise encore plus, ajoute Éric Bouchard. Pour la période de la relâche, on peut se tirer d’affaire, mais nos revenus seront à des années-lumière de ce qu’ils seraient en période normale.»
Minuit moins une
Mais pour M. Bouchard, la grande inconnue demeure l’après 8 mars : «On semble arrivés à la croisée des chemins avec la pandémie. Qu’est-ce qui prendra le dessus, dans deux ou trois semaines? Les variants ou les vaccins? Il n’y a personne qui saurait le prédire.»
Or, pour l’APCQ, il était minuit moins une et la décision de rouvrir les salles s’est appuyée sur une apparente accalmie de la pandémie, le désir des gens de venir au cinéma et sur l’aspect logistique de l’approvisionnement en films. «On ne peut pas rouvrir un cinéma du jour au lendemain. Nous sommes liés aux distributeurs de films. S’ils n’ont pas la masse critique, ils ne les sortent pas», explique M. Bouchard. Voilà donc ce qui a pesé dans la balance : «On s’est dit : sortons tous ensemble, les gens vont venir voir des films, ils vont se divertir et après la relâche, on verra.»
Parmi les propositions de l’ACPQ, il y a cette exception qu’on accorderait aux cinéphiles, après le couvre-feu, lesquels pourraient exhiber leur billet de cinéma comme sauf-conduit. «Ça fait partie des solutions que nous avons proposées. La décision appartiendra à la santé publique», indique Éric Bouchard, qui insistera également pour que les salles de cinéma puissent aussi vendre de la nourriture. Ce dernier rappelle que la chose avait été autorisée, en juillet et août, et qu’aucun cas de COVID-19 n’avait été déclaré dans les cinémas, partout au Canada.
Quoi qu’il en soit, les mesures qui s’appliqueront à compter de vendredi sont les suivantes : nombre limité de cinéphiles, obligation de porter le masque en tout temps et distanciation (minimum deux bancs entre chaque personne), tout comme on s’organisera pour décaler les représentations afin d’éviter une circulation trop importante dans corridors. «Nous sommes très conscients de l’importance d’opérer selon les règles», assure M. Bouchard.
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