Dans un courriel qu’il a fait parvenir, mercredi, à la présidente de la Commission scolaire de la Seigneurie-des-Mille-Îles (CSSMI), Paule Fortier, le président de la Corporation de l’Abbaye d’Oka et maire d’Oka, Pascal Quevillon, l’invite à réfléchir à la possibilité d’y déménager les bureaux de la Commission scolaire.
Le bail qui lie la CSSMI à Beauward, propriétaire de l’immeuble qu’elle occupe présentement, boulevard Arthur-Sauvé, à Saint-Eustache, vient à échéance dans quelques années. Selon Pascal Quevillon, qui cherche depuis quelque temps déjà les appuis financiers nécessaires qui lui permettraient de rénover l’abbaye d’Oka, ce déménagement s’avérerait donc profitable pour les deux parties.
«Je vous réitère mon offre afin que la CSSMI vienne s’y installer à la fin de votre bail actuel, et ce, pour la moitié des coûts, écrit M. Quevillon dans sa missive à l’intention de Mme Fortier. Il nous ferait un grand plaisir de vous accueillir dans notre municipalité et ainsi faire sauver plusieurs millions de dollars aux contribuables, sur une période de 10 ou 20 ans, comme bon vous semble.»
De 1,2 M$ à 600 000 $
Le montant actuel du bail de la CSSMI, qui occupe deux étages complets d’un immeuble qui en compte six, s’élèverait, selon nos sources, à près de 1,2 million de dollars par année. À l’Abbaye d’Oka, on serait prêt à leur offrir la même superficie pour quelque 600 000 $ annuellement.
«Dans l’éventualité où la CSSMI évoquerait les travaux importants à réaliser à l’abbaye pour justifier leur refus de s’y installer, d’ajouter Pascal Quevillon, même si elle devait payer deux millions de dollars pour la réalisation des travaux, les contribuables économiseraient encore des millions de dollars sur un bail de 10 ou 20 ans!»
À la CSSMI, mise au fait de cette proposition, on s’est contenté de répondre que «l’analyse pour le renouvellement du bail en 2021 sera amorcée l’an prochain» , avant d’ajouter que «aucun autre commentaire ne sera émis sur la proposition du président de l’Abbaye d’Oka.»
L’UPAC s’y est intéressé
Rappelons que quelques semaines avant la fin de l’année 2016, l’UPAC (Unité permanente anticorruption) avait analysé le bail signé entre la CSSMI et Beauward, propriété de Marc Bibeau, après que Lino Zambito, vedette de la commission Charbonneau, eut fait état de son intervention dans ce dossier dans son livre Le Témoin, publié en novembre 2016.
Au chapitre 14 de ce bouquin, en page 211, M. Zambito parle d’un appel qu’il dit avoir reçu de Marc Bibeau, «un matin de juin 2009» pour l’inviter à luncher. Il décrit celui qu’il a finalement rejoint vers 12 h 30 au restaurant Calvi du Centropolis de Laval, comme «le grand responsable du financement du Parti libéral du Québec (PLQ)» et comme un homme d’affaires actif dans les Basses-Laurentides.
«En plus d’être le principal actionnaire d’une grande entreprise de fournitures de poutres de béton [Schokbéton], écrit Lino Zambito, il [Marc Bibeau] possède également d’importants actifs immobiliers dont il loue les espaces. Il est notamment propriétaire de l’immeuble où loge la CSSMI.»
Plus loin, Lino Zambito raconte en détail cette rencontre avec Marc Bibeau, dont voici un extrait.
«Il [Bibeau] m’informe d’entrée de jeu qu’il a un service à me demander. Il m’explique que les dirigeants de la CSSMI, qu’il souhaite voir renouveler leur bail pour dix ans, hésitent à le faire et songent à acquérir leur propre édifice. […] Il aimerait que je fasse jouer mes contacts. […] L’assemblée générale de la Commission scolaire avait lieu le 23 juin en soirée. La décision fut prise par résolution de renouveler le bail avec Bibeau. Le lendemain, jour de la St-Jean, j’appelle Marc Bibeau pour l’informer du renouvellement du bail. Merci, me dit-il. Si jamais je peux faire quelque chose pour toi, n’hésite pas.»
Questionné à ce sujet par Le Devoir, Marc Bibeau avait alors répondu, par le biais de ses avocats, que ces allégations étaient «dénuées de tout fondement» et que les événements décrits par Lino Zambito «n’avaient jamais eu lieu» .
À la CSSMI, on s’était alors défendu qu’il y ait eu quelconques pressions politiques afin de demeurer dans l’immeuble du boulevard Arthur-Sauvé et qu’il était par ailleurs plus avantageux, financièrement, d’y rester (voir autre texte en page 4).
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