Dans une lettre signée de la main du grand chef Serge Otsi Simon, datée du 6 octobre 2017, et sur laquelle L’ÉVEIL a mis la main, celui qui dirige le Conseil mohawk de Kanesatake appuie ouvertement la candidate à la mairie d’Oka, Marie-Claude Provencher.
«Aujourd’hui, écrit le grand chef Simon, dans l’esprit de la poursuite de réconciliation et de clarté, je ressens le besoin d’exprimer mon support pour la candidate madame Marie-Claude Provencher en tant que mairesse d’Oka.»
Le grand chef du Conseil mohawk de Kanesatake va plus loin en affirmant que «une continuité au processus de Réconciliation entrepris en 2015 ne peut être assurée sans un changement de gouvernement à la mairie d’Oka» .
Il n’en fallait pas moins pour faire sursauter le maire actuel d’Oka et candidat à la mairie Pascal Quevillon. Selon lui, le grand chef Simon n’a pas à s’immiscer dans la campagne électorale.
«Imaginez que le maire d’Oka prenne position sur une préférence d’appui d’un candidat d’une ville voisine. Ce serait totalement de l’ingérence de ma part. Le grand chef Simon a franchi la ligne!» de dire M. Quevillon qui affirme par ailleurs que ce conflit, relié aux revendications territoriales de la communauté autochtone de Kanesatake relativement au projet du Domaine des Collines d’Oka, ne se réglera pas au niveau municipal.
«Les deux candidates à la mairie s’arrachent le Grand chef pour leurs campagnes électorales, poursuit Pascal Quevillon. Elles font des revendications territoriales leur cheval de bataille, en criant, haut et fort, qu’elles régleront, en quelques mois, des revendications qui datent de quelques centaines d’années. C’est extrêmement du rêve! Elles sont vraiment déconnectées de notre réalité!»
Aux dires du maire actuel d’Oka, une municipalité ne peut en effet régler des revendications vieilles de 300 ans, «à moins, insiste-t-il, qu’elles aient l’intention de remettre les clés de la mairie au Grand chef de Kanesatake. Les revendications territoriales sont de juridiction fédérale!»
Stéphane Gendron s’exprime
À ce sujet, pour comprendre davantage la problématique, nous avons contacté Stéphane Gendron, maire d’Huntingdon de 2003 à 2013 et chroniqueur à la radio et à la télévision. Celui-ci a récemment vécu une situation semblable à celle d’Oka à titre de propriétaire d’une ferme qu’il a acquise en 2011 à Dundee, en Montérégie, ne sachant pas que la communauté autochtone d’Akwesasne y revendiquait des terres. Il a aussi rencontré le Grand chef Abraham Benedict pour discuter de la rétrocession de sa terre.
«Le fédéral a fait un deal il y a deux ans et demi avec le conseil d’Akwesasne et Québec, a mentionné M. Gendron. En échange, les Mohawks ont reçu une contribution financière de plus de 250 millions de dollars. Ils ont aussi obtenu le droit de négocier de gré à gré avec les Blancs de Dundee, une municipalité qui fait partie des terres revendiquées.»
Dans certaines communautés autochtones, pour y résider, tu dois en être membre. Toutefois, ce droit acquis de négocier pourrait lui permettre de rester à Dundee. Ils sont de 300 à 400 personnes dans le même cas.
Négociations à sens unique
Élu maire d’Oka le 15 juin 2014, Pascal Quevillon affirme, au sujet des revendications territoriales de la communauté autochtone de Kanesatake, avoir tenu le même discours que ses opposants lors de sa première campagne électorale. Il s’est toutefois vite rendu compte, une fois arrivé à l’hôtel de ville, que «les négociations étaient à sens unique» , contrairement à ce qui semble s’être produit dans le secteur de Dundee, selon les dires de Stéphane Gendron, du moins.
M. Quevillon dit l’avoir constaté lors de la rencontre tenue à l’église d’Oka, le 11 septembre dernier.
«Nous, membres du conseil municipal, les représentants de la Sûreté du Québec, le représentant du ministre Kelley ainsi que les Okoises et Okois avons écouté nos voisins mohawks s’exprimer durant près de 45 minutes. Ensuite, quand le temps est venu pour les Okois de s’exprimer, les représentants de la communauté de Kanesatake sont sortis sans les écouter. Les réconciliations entre nos deux communautés doivent débuter par une réconciliation entre Ellen Gabriel et le Grand chef afin qu’ils parlent d’une seule et unique voix!» soutient Pascal Quevillon.
Ce dernier affirme avoir récemment rencontré le négociateur en chef du gouvernement fédéral ainsi que le directeur général des Affaires autochtones du Canada, mais que cette rencontre ne lui a rien appris de nouveau. Il affirme en outre qu’une offre similaireà celle faite à Akwesasne aurait été déposée à la communauté autochtone de Kanesatake. Malgré nos appels répétés au ministre des Affaires autochtones du Canada, nous n’avons pu obtenir confirmation.
«Malheureusement, a conclu Pascal Quevillon, ils ne veulent rien nous dire à propos de l’offre monétaire de plusieurs dizaines de millions de dollars offerte à Kanesatake, en juin dernier. Avec cette généreuse offre, la communauté de Kanesatake pourrait acquérir des terres okoises de gré à gré afin d’agrandir son territoire. Mon rôle comme maire de la Municipalité d’Oka est de protéger les droits et acquis des Okois tout en étant sensible aux droits et revendications autochtones et en conservant une communication ouverte de notre côté.»
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