Ces deux mots (vivre et ensemble), mis bout à bout, peuvent signifier tellement de choses, mais dans la bouche de Dan Bigras, ils font référence aux laissés-pour-compte, à ceux qu’on met volontairement de côté. Les jeunes de la rue, bien entendu, à qui il réserve toute la part de son engagement social depuis des lustres.
Des gens inspirants
«Je me raconte, mais dans mon histoire, l’affaire la moins intéressante, c’est moi» , exprime le conférencier qui tourne alors les réflecteurs sur les rencontres marquantes de sa vie. «Un paquet de monde qui ont été mis de côté, qui sont considérés comme des marginaux, qui ont des opinions dont on tient moins compte, mais qui se sont avérés, pour moi, les gens les plus inspirants» , décrit-il.
Comme ce garçon de 11 ans, qu’on avait guidé vers le dojo où Dan Bigras donnait des cours de boxe, pendant un certain moment, à des enfants issus de la clinique du Docteur Julien. «On appelait ça des cours de boxe, mais en réalité, c’était des cours de rage» , nuance le chanteur, expliquant que les jeunes qui ont été abandonnés, agressés, «maganés» de toutes les façons qu’on peut imaginer ont pour réflexe de fermer tous leurs canaux de communication. «Dès qu’ils en ouvrent un, il y a toujours un adulte qui en profite pour abuser, dit-il. Notre job, c’était de rouvrir ces canaux-là, mais à leurs conditions. Alors, on mettait les gants. Je peux dire qu’un p’tit gars de 11 ans en sacrament, ça fesse d’aplomb! Je me suis retrouvé dans les câbles assez souvent. Il a sûrement mis ça dans son CV: “J’ai sluggé Dan Bigras!”»
Rétablir le contact, rouvrir les canaux, demeure un exercice délicat qui demande beaucoup de tact et qui nécessite l’usage de différents langages. Celui du regard, celui de la parole, par exemple. «Ce sont des types de langages très puissants, qui peuvent véhiculer les plus belles choses comme les plus grandes perversions. Pour moi, soumet Dan Bigras, la perversion a un sens plus large que celui qu’on lui donne: ça signifie prendre quelque chose sans te soucier des dégâts que tu fais.»
D’abord, les écouter
Conséquemment, dira-t-il, la très grande majorité des jeunes de la rue se pose la même question: pourquoi est-ce que personne ne m’aime? Et la réponse qui vient est toujours la même: parce que je ne mérite pas d’être aimé. Les écouter, c’est déjà leur redonner une certaine dignité. «C’est primordial pour avoir la sensation qu’on vaut quelque chose» , lance Dan Bigras.
Comme beaucoup de ceux qui ont fréquenté le dojo, le garçon dont on vous parle plus haut a fini par s’ouvrir, à se livrer avec confiance. Son message était à ce point chargé de résilience que Dan Bigras l’a reçu comme un coup de massue. «C’était une leçon, pour l’adulte que j’étais, donnée par un enfant de 11 ans» , révèle le conférencier qui dit transporter avec lui une multitude d’exemples de ce genre qu’il veut tout bonnement partager avec vous, dans une conférence qui tournera à coup sûr à l’échange, un exercice auquel il se prête depuis une vingtaine d’années, en fait, alors qu’on lui demandait parfois de venir parler de son film Le ring intérieur.
Et l’artiste n’est jamais bien loin du conférencier, en ce sens que la conférence de Dan Bigras, sans être un spectacle, est construite de manière à garder son public captif et actif. «Échanger avec le public, je ne peux pas faire ça en spectacle. Je chante, on m’applaudit et ça s’arrête là. Là, on se parle, je vous montre quelque chose et j’attends vos réactions. Venez voir tous ces gens que j’ai dans la tête» , invite le conférencier qui sera donc au Centre d’art La petite église, à Saint-Eustache, le jeudi 28 février à 20 h. Les billets, au coût de 40 $, sont en vente via le site [http://maisonsercan.ca].
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