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Cannabis: des intervenants sur le terrain se prononcent sur la question

Crédit-photo Réseau International –

La légalisation du cannabis à des fins récréatives suscite des réflexions de la part d’intervenants œuvrant sur le terrain.

Cannabis: des intervenants sur le terrain se prononcent sur la question

Publié le 17/10/2018

Si plusieurs sont en accord avec la légalisation du cannabis à des fins récréatives, ils sont aussi nombreux à dénoncer cette décision du gouvernement libéral de Justin Trudeau. Les organismes qui œuvrent auprès des jeunes ou qui interviennent sur le terrain ne font pas exception à la règle. Tour d’horizon de réflexions recueillies auprès de certains de ceux qui ont accepté de répondre à quelques questions sur ce sujet, ces derniers jours.

Dans le cas de Donald Allard, directeur et intervenant en dépendance pour l’Unité Domrémy de Sainte-Thérèse, qui a bien voulu livrer ses commentaires, mais à titre personnel, celui-ci déplore la précipitation avec laquelle la légalisation du cannabis s’est effectuée. Il croit que la «seule urgence» depuis quelques décennies aurait été de décriminaliser la possession et la culture du cannabis pour un usage personnel.

«Au sujet des conséquences de cette légalisation chez les jeunes et pour l’âge légal permettant de s’en acheter à 18 ou 21 ans, j’ai l’impression que nous allons assister au même phénomène actuel concernant la consommation de l’alcool et du tabac chez les adolescents. Donc, 18 ou 21 ans, cela ne fera pas de différence pour l’accessibilité par des tiers plus âgés. J’espère que les conseillers à la nouvelle société d’État pour la vente du cannabis auront réellement des attitudes, des comportements et des priorités différentes de ceux de la Société des alcools du Québec» , d’indiquer le directeur de l’organisme qui apporte aide et soutien aux personnes vivant des difficultés personnelles associées à des dépendances.

Cela dit, M. Allard croit, par ailleurs, que cette légalisation devrait être une opportunité d’investir davantage «dans des actions de prévention primaire, secondaire et tertiaire auprès des jeunes, jeunes adultes, adultes et parents» . Et, ensuite, de «consolider les ressources internes et externes qui viennent en aide aux toxicomanes» . Puis, enfin, «d’entreprendre un vrai débat public concernant la très grande utilisation des psychotropes licites dans notre société afin de développer d’autres alternatives» .

Une occasion d’agir différemment

Pour sa part, Annie-Claude Fafard, agente de planification, de programmation et de recherche à la Direction de santé publique du Centre intégré de santé et de services sociaux (CISSS) des Laurentides, est plutôt d’avis que la légalisation du cannabis constitue «une occasion d’agir différemment sur un ensemble d’effets négatifs entraînés par sa consommation dans un contexte de prohibition» .

En outre, Mme Fafard rappelle que l’une des principales préoccupations pour la Direction de santé publique est de prévenir ou de retarder l’initiation de l’usage chez les non-consommateurs, particulièrement chez les jeunes, et que sa légalisation comporte des conséquences.

«La banalisation du produit est l’une de nos craintes. En ce sens, l’éducation et la prévention sont primordiales, [mais] la légalisation du cannabis nous permet [aussi] d’avoir des leviers supplémentaires en matière de prévention. Parmi ceux-ci, notons principalement le fait de pouvoir encadrer la qualité du produit, éviter la criminalisation et diminuer la stigmatisation des consommateurs, de même que leurs réticences à chercher de l’aide» , d’indiquer l’agente, rappelant au passage que la recommandation des directeurs régionaux de santé publique concernant l’établissement d’un âge légal était de 18 ans.

Une légalisation souhaitable

Oeuvrant directement auprès des jeunes, à titre de directrice de la Maison des jeunes Sodarrid, à Boisbriand, qui a commenté la question, également à titre personnel, Sophie Charbonneau est d’accord avec cette légalisation. Et cela, à partir de 18 ans, car en augmentant l’âge, «on encouragera le marché noir à continuer ses activités, car un bon nombre de consommateurs (qui ont entre 18 et 24 ans) seront dans l’interdiction de consommer» , fait-elle remarquer.

«En légalisant, à moyen terme, cela diminuera potentiellement le marché noir de cette substance. Il sera plus facile et possible de connaître le contenu des produits du cannabis. La légalisation permettra aussi de la prévention sans culpabilisation ou campagne de peur. La population sera mieux informée. Les préjugés envers les consommateurs diminueront, en tout cas j’espère, et l’expérience des pays qui ont légalisé est qu’il n’y a pas plus de consommateurs qu’avant la légalisation» , d’expliquer Mme Charbonneau.

«La légalisation et la vente des produits du cannabis apporteront une rondelette somme d’argent dans les coffres du gouvernement. Il serait vraiment intéressant qu’une partie significative de cet argent soit retournée aux milieux qui œuvrent tant en prévention qu’en curatif auprès des populations vulnérables, jeunes et moins jeunes» , de recommander la directrice.